L’importance de l’investissement socialement responsable (SRI) a considérablement augmenté ces dernières années et est devenu presque une forme d’investissement traditionnel pour certains investisseurs. Cette tendance est probablement irréversible et pour de bonnes raisons. Les préoccupations relatives à l’environnement (pénurie d’eau, changement climatique et épuisement des ressources naturelles en général) – illustrent bien que les facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) peuvent avoir un impact significatif sur la performance d’une entreprise et de ses actions, et donc sur les portefeuilles d’investissement. Par conséquent, l’intégration des facteurs ESG dans le processus d’investissement est essentielle pour optimiser les caractéristiques risque / rendement de son portefeuille. L’adoption de cette forme d’investissement pour les associations et fondations s’accélère dans les pays anglo saxon, mais la France reste encore à la traîne.
Misconception que l’investissement socialement responsable diminue la performance
L’une des raisons pour lesquelles l’investissement socialement responsable est encore peu adoptée par les investisseurs, et notamment les organisations caritatives, est la fausse perception qu’investir de manière responsable (ce qui signifiait par le passé exclure certains investissements d’un point de vue éthique) réduit l’univers investissable et aurait donc un impact négatif sur les performances dudit investissement. Pour cette raison, de nombreuses associations et fondations ont refusé pendant longtemps d’adopter une politique d’investissement responsable, disant que cette politique constituerait une violation de leur obligation fiduciaire qui serait de maximiser le rendement de leurs investissements.
En réalité, de nombreuses études ont prouvé maintes fois que l’incorporation de facteurs ESG améliore le rendement (avec une certaine protection à la baisse – évitant les gros scandal du type BP) et améliore les caractéristiques rendement d’un portefeuille d’investissement par rapport à son risque. D’autres études ont montré une corrélation entre de bons scores ESG pour une entreprise et la performance du cours de ses actions. Ces constatations sont peu surprenante sachant que l’objectif d’investir de façon responsable est tout simplement la rechercher des modèles économiques durables, qui permettent souvent à une entreprise d’avoir un avantage concurrentiel. Il est maintenant admis, que l’utilisation de facteurs ESG dans sa politique d’investissement n’est pas une violation de l’obligation fiduciaire d’un gestionnaire des actifs d’une association ou fondation. Aujourd’hui l’intégration des facteurs ESG est souvent considérée comme une approche plus complète de l’investissement (en plus du travail de valorisation financière). Cette prise de conscience conduit progressivement à mettre davantage l’accent sur
Impact sur la réputation et la société en général
Nous l’avons souligné plusieures fois, l’atout principale d’une association ou une fondation est sa réputation. Sans reputation, trouver des donateurs sera presque impossible. Or aujourd’hui, les risques de réputation pour les organismes caritatifs est potentiellement plus grands quand on regarde à quelle vitesse l’information peut se diffuser. Nous avons parlé plusieures fois du Royaume Unis qui a été récemment secoué par un scandal liant l’investissement de L’Eglise anglicane dans la plus grosse société de prêts sur salaire du pays, Wonga, une société qu’elle dénonçait elle-même. Ce scandal a été suivi par l’exposé des investissements d’une autre association, Comic Relief, dans les sociétés de tabac, d’alcool et d’armes et l’annonce de la perte de Greenpeace d’environ 3 millions de livres sterling due à la spéculation sur les devises. Tous ces scandals ont impacté négativement ces associations, détruisant une partie de la confiance du public. L’intégration des facteurs ESG dans le processus d’investissement aurait aider ces organisations à se prémunir contre ce risque de réputation de plusieurs façons. Tout d’abord, une politique d’investissement responsable naturellement met l’accent sur des entreprises ayant des modèles économiques plus durables, ce qui devrait avoir un effet positif sur la société et l’environnement (toute association serait par définition en accord avec ce principe). Mais surtout l’investissement responsable offre aux associations la possibilité de refléter leurs propres croyances et valeurs dans leurs portefeuilles d’investissement. Une association soutenant les victimes de la guerre ne peut pas justifier “moralement” un investissement dans une société qui principalement fournit des armes. Mais investir responsablement ne doit pas seulement exclure certaines entreprises (c’est le problème de la sur-performance des industries du tabac, armes, jeux etc…), mais peut également chercher à savoir quelles entreprises sont en progressions lorsque les facteurs ESG sont analysés (le marché s’éloigne lentement d’une approche uniquement motivée par l’exclusion).
Impact sur la possibilité de collecter des dons
Pour les associations, le sujet de l’intégration de critère ESG dans leurs investissement est également de plus en plus important du point de vue de leur possibilité de récolter des dons. Les donateurs sont de plus en plus sensibles à une attitude responsable des associations (voir le récent scandal de Oxfam au Royaume Unis), et une intégration ESG appropriée dans le processus d’investissement peut être un facteur important dans leur décision de soutenir un organisme comparé à un autre.
L’intégration des facteurs ESG
La façon dont les investisseurs intègrent les facteurs ESG dans leur processus d’investissement a également progressivement évolué. Traditionnellement, analyser les facteurs ESG n’étaient souvent pas entièrement inclus dans le processus d’investissement ou étaient considérés comme extérieurs à celui-ci. Aujourd’hui une analyse financière doit toujours inclure une vue sur les facteurs ESG, dont l’omission pourrait conduire conduira à une évaluation incomplète de la juste valeur d’une entreprise. Le point essentiel de l’intégration des facteurs ESG dans une analyse d’investissement est de regarder l’importance de ces facteurs. Des facteurs importants comprennent les normes de sécurité, l’impact sur l’environnement, les questions sociales et de travail (une association qui aide les enfants forcés à travailler dans des pays défavorisés ne peut pas investir dans un société qui emploi des enfants dans ces usines), et la corruption. Au Royaume Unis, les associations intègrent parfois des critères plus strictes, y compris les critères immatériels, qui reflètent leurs valeurs et leurs croyances. Par exemple, l’Église anglicane, a comme principe de déconseillé d’investir dans les sociétés qui réalisent plus de 3 % de leurs bénéfices dans la pornographie, 10 % dans la défense et 25 % dans des activités relatives à l’alcool, les jeux d’argent et impliquant des taux d’intérêt élevés.
Les associations et fondations en France suivront rapidement les pas des pays anglo saxons en réalisant une véritable intégration ESG dans leur processus global d’investissement. Nous voyons déjà certaines grandes fondations en France publier de l’information sur leurs investissement responsables. Cette tendance ne fera que s’accroître.